La privatisation :

- Aspects théoriques de la privatisation.

Parmi les phénomènes qui ont marqué le monde économique ces vingt dernières années, on remarque la montée en puissance du capitalisme. Une des manifestations de ce mouvement est la très grande confiance faite aux forces du marché, et à l'abandon par Etats des moyens de production au profit des particuliers. Ce processus de « dénationalisation » qui prend l’appellation actuelle de «Privatisation» sous le gouvernement conservateur de Margaret Thatcher en 1979 en Grande Bretagne, a gagné le monde et modifié le rôle de l'Etat aussi bien dans les pays développés que dans ceux en voie de développement.
La vitesse avec laquelle le phénomène se repend est surprenante. En effet, ni la littérature théorique disponible, ni les résultats ambigus des quelques recherches empiriques sur le phénomène ne peuvent justifier cet engouement en faveur de la privatisation.
Aujourd'hui, plus de vingt ans après le lancement des premiers programmes de privatisation, il serait intéressant de s'interroger davantage sur la question. Si la littérature actuelle recense plusieurs fondements théoriques des privatisations, il reste que les études empiriques n'arrivent pas toujours à corroborer entièrement l'hypothèse d'accroissement de performance induite par la privatisation.
Il importe de revisiter le concept de privatisation dans son contenu et ses objectifs en même temps le processus de la fin programmée de la Compagnie Malienne du Développement des Textiles.

- Le cadre conceptuel de la privatisation.

Dans toute économie organisée, il existe un secteur public et un secteur privé. Le premier est caractérisé par un fort engagement de l'Etat dans l'activité économique alors que dans le second, ce sont les particuliers réunis en groupes ou individuellement qui interviennent. On parlera par exemple d'entreprise publique (dans laquelle l'Etat détient la majorité ou la totalité du capital) par opposition à l'entreprise privée. Le passage d'un secteur à un autre est une opération sous-tendue soit par une volonté politique, soit par une exigence des bailleurs de fonds internationaux qui l'introduisent dans un grand ensemble appelé programme d'ajustement structurel. En effet, la transformation du secteur privé en secteur public porte le nom de nationalisation ; son contraire est la dénationalisation ou privatisation, qui est une politique libérale visant à désengager l'Etat du secteur productif.
Quel est le véritable visage de la privatisation des sociétés et entreprises d’Etat ? Quels sont ses fondements théoriques ? Ce sont là les questions auxquelles ce chapitre tentera d'apporter une réponse. Il est structuré en deux sections, La première nous donnera une idée sur le contenu et les objectifs des privatisations. La deuxième reviendra sur le processus du désengagement de l’Etat Malien de la filière coton.

- privatisation ; définition et objectifs.

Le concept de privatisation a un contenu différent selon les auteurs. Traditionnellement, la privatisation est définie comme un transfert d'actifs détenus par les agents publics au profit des agents privés (BÖS 1991). L'Etat qui détient la propriété d'une entreprise, se désengage progressivement ou en bloc en cédant les droits de propriété à des particuliers qui deviennent alors les nouveaux propriétaires. Pour exercer efficacement le contrôle de l'entreprise, le nouveau propriétaire doit pouvoir détenir la majorité du capital. Ce qui fait dire à certains auteurs que la privatisation est la cession par l'Etat de plus de la moitié du capital aux privés. C'est donc un transfert du contrôle de l'entreprise à des agents privés.
Cette conception du phénomène de privatisation justifie l'analyse faite par de nombreuses recherches sur les effets du transfert de propriété sur la performance de la firme. En effet pour la majorité d'entre elles, l'accroissement de performance attendue après chaque privatisation est dû au seul changement de propriétaire (public/privé). Mais seulement, les résultats de ces recherches amènent à penser que la privatisation ne saurait se limiter à la seule nature de la propriété mais qu'elle est davantage à l'origine d'un changement organisationnel plus complexe.
A l’analyse, on se rend compte que la privatisation engendre des modifications organisationnelles profondes. Ces Changements s'opèrent principalement à trois niveaux :
- Le processus organisationnel ;
- Le système de gouvernance ;
- Le niveau de valeur appropriable par les partenaires de l'entreprise (Chatelin 2001)
Et même elle affaiblir les capacités normatives d’un Etat ; juridiquement elle peut tuer la loi. (Jean Ziegler)
Williamson (1992) affirme à cet effet que « la privatisation consiste à placer la coopération sous la gouvernance du marché financier privé. Elle engendre des modifications au niveau organisationnel permettant à la firme de passer d'une gouvernance de la forme fonctionnelle à une gouvernance de la forme multi-décisionnelle». Nous reviendrons en profondeur sur ces relations entre privatisation et gouvernance. Le moins que l'on puisse dire à ce niveau est qu'en analysant les modifications organisationnelles internes consécutives à la privatisation, la conception traditionnelle du seul changement de propriété est dépassée. En ce sens, elle constitue également un transfert des droits décisionnels, et une modification du système de gouvernance.
A un troisième niveau, la privatisation pourrait être considérée comme l'ouverture à la concurrence, la déréglementation d'un secteur. Celle-ci se manifeste par la disparition des monopoles publics et l'entrée de nouveaux opérateurs dans le secteur. Ici ni le contrôle, ni la direction de l'entreprise, encore moins l'architecture organisationnelle ne sont modifiés. La seule manifestation visible de cette forme de privatisation est l'accroissement de l'offre du service ou du bien produit par l'entreprise.

- les objectifs de la privatisation dans les pays développés.

Dans les pays développés, les privatisations sont une volonté politique réelle et font partie des programmes électoraux des partis politiques. Ce sont des instruments de politique économique qui sont décidés par les gouvernements de manière autonome. Elles ont pour objectifs :
- D'assouplir les contraintes budgétaires ;
- De développer l'actionnariat populaire ;
- De promouvoir la participation des salariés au capital des entreprises ;
- De réduire le poids de l'Etat dans l'économie et restaurer les mécanismes de marché afin d'accroître l'efficacité du système économique global ;
- De remédier à la sous capitalisation de certaines grandes entreprises publiques.
Pour atteindre ces objectifs, il existe des structures d'accueil : un secteur privé dynamique et attractif, une épargne privée, des repreneurs, des marchés financiers développés, un cadre institutionnel adapté, et des informations disponibles.

- les objectifs de la privatisation dans les pays en voie de développement.

Dans ces pays la volonté politique est non réelle. La privatisation fait partie des politiques d'ajustement structurel et devient même une des conditionnalités pour l'octroi des prêts par les bailleurs de fonds internationaux. Olivier Campbell et Anita (1998) mentionnent que les pays Africains ont privatisé pour les raisons suivantes :
- Changement politique ;
- besoin d'octroi d'aide financière de la Banque mondiale, du Fonds Monétaire International et d'autres donneurs ;
- nécessité de mobiliser des fonds en vendant des entreprises ;
- état précaire de certaines entreprises publiques ;
- impératif de maintien des niveaux d'emploi ;
- Parfois, nécessité de satisfaire des intérêts spéciaux.

KEBE.Ibrahima

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