Hugo Chávez dit « Ciao » à la Banque mondiale et au FMI.

« Messieurs du FMI et de la Banque mondiale, nous vous disons Ciao ! »

C’était le 20 avril à Washington, cette phrase provocatrice était lancée par le ministre vénézuélien des Finances, Rodrigo Cabezas.

Ce jour-là, il est venu à Washington remettre un chèque pour solde de tout compte de 3,3 milliards de dollars au FMI. Hier, le président Hugo Chávez, qui depuis son élection fin 1998 n’a cessé de clamer ses ambitions panaméricaines, a annoncé que son pays se retirait « avec effet immédiat » des institutions de Bretton Woods.
Les pays du sud vont créer leur propre banque

Qualifiant la Banque mondiale et le Fonds monétaire international de « mécanismes aux mains de l’impérialisme nord-américain » destinés à exploiter les pays pauvres, le chef de file de la gauche radicale latino-américaine, réélu en décembre, a également annoncé une hausse de 20 % du salaire minimum.

A part le président socialiste de l’Equateur, Rafael Correa, aucun autre président d’une Amérique latine de plus en plus marquée à gauche n’a ouvertement salué la décision de Hugo Chávez.
Que fait l’Afrique ?

Récemment, Correa n’avait pas hésité à expulser d’Equateur le représentant de la Banque mondiale. Mais ce silence diplomatique n’empêche pas la plupart des dirigeants latino-américains de gauche d’émettre de sévères critiques à l’encontre du FMI et de la Banque mondiale.

Tous ont vécu comme une tutelle pesante les cures d’austérité du consensus de Washington imposées par les deux institutions de Bretton Woods pendant les périodes de dettes et d’hyperinflation des décennies 80 et 90. Cures d’austérité qui se sont traduites pendant près de vingt ans par un retrait du rôle de l’Etat. Le tout sur fond d’ouverture économique et de libéralisation financière.

La critique traverse tout le sous-continent américain, à tel point que l’idée du Venezuela de recourir, pour d’éventuels financements, à une « Banque du Sud » a reçu le soutien de l’Argentine, de la Bolivie, de l’Equateur...

Et depuis peu d’un Lula da Silva toujours partagé entre « réalisme économique » et critique à l’égard des grands organismes internationaux. L’idée d’une « Banque du Sud » est de profiter de la bonne santé de l’économie régionale pour fonder un organisme permettant aux pays latino-américains d’affronter en toute autonomie les coups durs.

Chávez se fait fort de la faire naître en juin. En attendant, celui qui ambitionne de fonder le « socialisme du XXIe siècle » est en visite dans la ceinture de l’Orénoque. Là où se joue l’avenir du Venezuela. Là où des entreprises pétrolières étrangères contrôlent l’extraction de l’or noir. Là où il entend lancer un mouvement de nationalisation des industries des hydrocarbures.
Venezuela : Chavez nationalise le pétrole de l’Orénoque

Le président vénézuélien Hugo Chavez a posé un nouveau jalon dans la nationalisation des activités stratégiques du pays le 1er mai en faisant occuper par l’armée et le "peuple", les gigantesques gisements pétroliers de l’Orénoque.

Des ouvriers appuyés par des militaires ont pris à l’aube le contrôle opérationnel du complexe de José, à 250 km à l’est de Caracas, "des installations qui nous avaient été usurpées par les capitaux étrangers", a affirmé le ministre de l’énergie, Rafael Ramirez, qui dirigeait l’opération. "Travailleurs du Venezuela, nous serons invincibles. Il nous est donné de réaliser le projet révolutionnaire de Simon Bolivar (le "libérateur" sud-américain)", s’est exclamé Hugo Chavez, depuis ce site proche de la Ceinture de l’Orénoque, zone au nord du fleuve homonyme qui couvre 55.300 km² et qui est considérée comme le plus prometteur des réservoirs pétroliers de la planète.

L’occupation marque la fin de l’ouverture aux capitaux étrangers des années 90 et il s’agit d’une "vraie nationalisation de nos ressources naturelles" par comparaison avec celle de 1976, a assuré M. Chavez, devant 6.000 personnes qui l’ont acclamé en disant : "c’est ainsi qu’il faut gouverner".

Le renforcement de la présence étatique dans le pétrole est l’une des facettes du virage anti-libéral impulsé par Chavez, qui a annoncé à grands fracas le 30 avril la sortie du Venezuela du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.

Après sa réélection triomphale en décembre, M. Chavez, au pouvoir depuis 1999, a accéléré la prise de contrôle de secteurs stratégiques tels que l’électricité ou les télécommunications.

La nationalisation du pétrole de l’Orénoque passe concrètement par une montée du groupe public vénézuélien PDVSA à 60% du capital des 4 entreprises mixtes exploitant le brut extra-lourd de cette région.

Il s’agit donc d’une occupation surtout symbolique puisque la quasi-totalité des firmes étrangères engagées dans la zone ont donné cette semaine leur accord pour céder la majorité de leurs filiales à Petroleos de Venezuela (PDVSA).

Les signataires (la Française Total, la Norvégienne Statoil, les Américaines Chevron Texaco et Exxon Mobil, la Britannique British Petroleum et l’Allemande Veba Oel) ont jusqu’au 26 août pour négocier les détails de l’opération. M. Chavez s’est engagé à les indemniser pour la cession partielle de leurs actions mais sur la base de la valeur comptable, pas celle du marché.

L’américaine Conoco Philips poursuit de difficiles tractations tout comme l’italienne Eni et Petrocanada. Pour le gouvernement, l’Orénoque est stratégique parce qu’extrêmement riche en pétrole avec des réserves estimées à 270 milliards de dollars dont Caracas a entrepris la certification avec l’aide de firmes issues de pays émergents ou "amis". Une fois prouvées, elles propulseraient le Venezuela au premier rang mondial devant l’Arabie saoudite.

Mais le Venezuela a besoin du savoir-faire des "majors" du pétrole pour continuer de produire quotidiennement 600.000 barils par jour dans cette zone, ce qui explique que les entreprises mixtes conserveront une forte participation étrangère, selon des experts du dossier.

Jusqu’à il y a 2 ans, elles bénéficiaient de conditions fiscales très avantageuses avec des royalties de seulement 1% et des impôts limités à 34%, portés respectivement à 33,2% et 50% par Chavez.

Le Venezuela, seul membre latino-américain de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et cinquième exportateur mondial de brut, produit 3,09 millions de barils par jour, vendus pour moitié aux États-Unis.

Libération du 2/05/07 - Par Vittorio DE FILIPPIS.

Commentaires

Frédéric a dit…
En en 2010, ce retrait annoncé n'est toujours pas effectif.

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